11 avril 2006

La grande régression

Je vois fleurir ici et là la nouvelle mode des femmes de Tunisie. La mode des femmes voilées est de retour dans les paysages de la Tunisie. Au nom d’une supposée liberté retrouvée beaucoup de femmes choisissent de mettre cette « protection » de leurs cheveux, une protection de la tentation que peut exercer les cheveux sur la gente masculine. Voilà 50 ans que le père de l’indépendance tunisienne a entamé sa croisade contre ce symbole de la soumission féminine. La génération de mes parents l’a vu à la télé ôter le « Safsari » de la tête des femmes tunisiennes. La nouvelle génération de femmes n’a pas connu cette époque de notre histoire enfouie. Quand la Tunisie de nos amours a retrouvée l’indépendance en 1956, la situation des femmes était la suivante. L’éducation des femmes était un péché au nom de leurs préjugés religieux. Les femmes étaient interdites dans la rue et les lieux publics. Les femmes découvraient leurs maris pendant leur nuit de noces. Les seules sorties possibles était pour aller de la maison du mari à la maison du père ou du grand père. Leur tenue traditionnelle, le fameux « safsari », leur servait de déguisement parfait pour leur déplacement. Les nouvelles femmes voilées n’ont pas connu cette situation de discrimination et de mise au pas de leurs grands-mères. Ce sont les femmes de l’émancipation. Ce sont des femmes qui sont allées à l’école et ont reçu des diplômes. Au nom de dogmes rabachés par des prédicateurs de chaînes satellitaires, ces femmes choisissent de se mettre les tenues que leurs grands-mères et leurs mères ont combattues et vaincues. La Tunisie était une exception culturelle avant que la mondialisation à travers les satellites sonne le nivellement vers le passé. Les tunisiennes ont oublié qu’elles étaient en avance sur les autres pays du moyen orient et veulent désormais ressembler à ces femmes qui sont interdites de sortie de leurs maisons, qui sont interdites de conduire, qui sont interdites de devenir magistrat. Malheureusement, ces femmes se sont laissés convaincre par ces prédicateurs qui manient les mots si subtilement qu’ils peuvent envoûter n’importe quelle personne en jouant sur le registre de l’émotionnel, un canal de communication très puissant chez la majorité des femmes. Ces femmes n’ont malheureusement pas lu, entendu, écouté l’ancien numéro 2 du mouvement intégriste algérien rappeler la démarche de retour à la bonne religion de toutes ces femmes musulmanes. Les femmes doivent remettre le voile comme première étape. Ensuite, elle n’ont le droit qu’à des métiers typiquement féminin, enseignante, médecin, … A terme ces femmes sont invitées à ne plus aller aux universités, car les métiers où les hommes et les femmes sont mélangés dans les mêmes lieux de travail doivent être progressivement prohibées. Dans un monde où il y a un chômage élevé et que la responsabilité de subvenir aux besoins du foyer revienne aux hommes, la priorité de travailler est donnée aux hommes. Si les femmes restent aux foyers, il faut adapter leur éducation par un programme très adapté à l’éducation des enfants et au respect de son mari. Une femme vertueuse est une femme qui a contenté son mari. Bref le programme de ces leaders de la « nouvelle renaissance » est de retourner à la situation des années 1950. Comment ces femmes « libres », libérées, émancipées peuvent se laisser entraîner dans un processus de régression général au nom de préceptes divins. Femmes de Tunisie, je vous en supplie, réveillez vous, le péril passéiste vous guette. Ne vous laisser pas séduire par des hommes qui pensent que vous êtes des êtres inférieurs, qui pensent que votre constitution physique et psychique vous donne un statut d’être inférieur où votre jugement, votre témoignage n’a pas le même poids que celui d’un homme. Femmes de Tunisie, je souhaite de tout mon cœur que vous puissiez résister avec la raison qui vous a été donné par un dieu juste et équitable.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Welcom to the Blogosphère!!!

analyse très pertinente, je te rajoute dans mes liens.

Anonyme a dit…

Le péril passéiste consiste à porter le voile? Je ne le pense pas. Je trouve que votre témoignange ne donne pas à la femme tunisienne sa juste valeur, elles peuvent porter le voile, cela ne les empêche aucunément de pratiquer des métiers d'hommes, de conduire ou faire une sortie entre filles. Nous avons des femmes chauffeurs de bus voilées en Tunisie! c'est cela notre victoire. L'important est de laisser à tout un chacun la liberté de choisir, de porter le voile ou de ne pas le faire, d'être musulman, catholique, juif ou athée.

A vous lire, j'ai le sentiment
que vous vous adresser à des êtres diminués sans capacité de discernements. Plutôt d'avoir dénoncé le premier aspects de la schizophrénie de notre société, faillait peut être en dénoncer le second. Les strings visibles me semblent un sujet de débat plus pertinent...

Anis

Anonyme a dit…

Je suis totalement d'accord avec cette analyse. Elle me fait prendre conscience, en tant que femme tunisienne, de la nécessité de réagir et de faire prendre conscience à mon tour, à toutes les femmes de note pays, du danger qui nous guette. Malgré le constat que nous faisons, malgré le sentiment désagréable qui nous envahit à chaque fois que nous remarquons la prépondérance de ces tenues insolites qui ne rappellent en rien notre histoire, nos traditions ou encore notre modernité, personne ne réagit! Nous sommes en train d'abdiquer, de nous habituer petit à petit et c'est là le plus grave! Ces femmes voilées qui croient être protégées derrière leurs tenues vestimentaires et qui croient avoir la liberté de travailler et d'avoir des activités similaires à celles des femmes non voilées, ne sont pas conscientes qu’elles sont en train de servir des valeurs et des causes qui ne sont pas les leurs, ni celles des autres tunisiennes! Elles ne réalisent pas qu'elles sont influencées par une force insidieuse non visible, accentuée par les médias orientaux, qui les mène vers un chemin de plus en plus étroit, au bout duquel, elles seront piégées et ne pourront plus faire marche arrière. Elles ne comprennent pas, qu'à travers ces tenues, elles envoient des messages très dangereux, qui risquent de mener des générations entières vers l'abîme. Leur message est clair: nous sommes des femmes et en tant que telles, nous devons nous cacher des regards des hommes et ne pas provoquer chez ces derniers des pulsions!!! Mais ceci ne fait que réduire la femme au statut de femme objet, incapable de décider de son destin tout en réduisant l'homme à la position de l’animal incapable de se contrôler.
Pour l’instant, certaines d’entre elles, continuent d’exercer une activité normale. Elles ne réalisent pas que l’étape suivante sera de ne plus se montrer, ne plus se mélanger aux hommes et donc ne plus sortir. Elles devront aussi assurer leurs devoirs de femmes et non pas ceux de citoyennes et donc ne plus s’instruire et se cultiver ! L’ombre du monstre extrémiste est bel et bien présente et si nous n’y prenons garde, elle ne sera plus qu’une ombre !!!
NB

Anonyme a dit…

Je suis totalement en phase avec cette analyse et le témoignage apporté par l’utilisatrice anonyme NB. Comme elle, je suis très pessimiste sur l’avenir des femmes tunisiennes en ce qui concerne leur liberté et leur modernité. En effet, la généralisation du port du voile n’est qu’un début à l’évolution de la société vers la non mixité, qui se fera évidemment aux dépends de l’activité professionnelle et culturelle des femmes.

Pour moi, ce port de voile est un acte avilissant. Pourquoi serions-nous obligées, nous les femmes, de supporter cette contrainte aussi bien humiliante que gênante dans la vie de tous les jours, afin d’éviter que ces messieurs n’aient « de mauvaises pulsions » ? Pourquoi revient-il toujours à la femme de faire des concessions dès qu’il y a une problématique entre les deux sexes?

Autant je pourrais trouver des excuses à ces femmes évoluant dans des milieux très modestes : elles utilisent le voile comme défense contre toutes sortes d’abus susceptibles d’être perpétrés par leurs proches. En effet, dans ces milieux à tendance plutôt extrémiste, je veux bien admettre que le port du voile (obligation religieuse) est un moyen facile pour aider les femmes à garder leur dignité face à des hommes frustrés par la vie.
Autant je n’arrive en aucun cas à comprendre ces bourgeoises, qui redoublent d’ingéniosité pour rendre leurs voiles attrayants et bien seyants autour de leurs visages en général bien maquillés. Notons qu’elles continuent à s’habiller à la mode avec des tuniques transparentes laissant entrevoir leurs formes bien dessinées et serrées dans des jeans ou autres…Est-ce vraiment pour se cacher du regard des hommes qu’elles portent ce voile ou ne serait pas pour se donner un genre…peut-être une nouvelle mode ???

Femmes tunisiennes, arrêtons nous pour nous demander quelles perspectives et quelle image de la femme laisserons nous comme héritage à nos filles ?
IM

Anonyme a dit…

Je me suis toujours appliquée à me soustraire de ce genre de débat. Mais, comme tu m’as demandé quelles étaient mes initiales, j’ai supposé que tu as lu le commentaire de NB en pensant que c’était moi. Alors, je me suis décidée à te donner (rapidement) mon point de vue (moi c’est NC). Je suis en grande partie d'accord avec toi, Hatem. Le pire c'est que le port du voile n'est même pas une conviction portée fièrement comme un drapeau emblématique. Il n'est que le cache-misère mentale générée par un doute obscur et un profond désordre (pour ne pas dire le néant ou le chaos) dans les principes, les idéaux, les dogmes et les modèles. Dans ma vue d’ensemble, il me semble que chez ces femmes voilées tout se mélange: la religion, l'égalité ou l’inégalité des sexes, le refus de l'occident, l'élégance d'antan, la pseudo authenticité retrouvée ou perdue, un retour aux sources (on se demande bien lesquelles), une certaine féminité new look, l'identité "femme moderne, oui, mais musulmane avant tout", la féminité qui dit « ne me regardez pas comme un vulgaire objet de désir », l'hypocrisie de « ça rassure papa ou grand frère et ils me foutent la paix » et aussi, comme tu le mentionnes le mimétisme du aux chaînes TV satellite... j'en passe et des meilleures.

Le "safsari" était aussi un "cache-misère" pour les femmes de condition sociale modeste.Mais il était aussi porté dans la haute société comme un atout d'élégance et de charme discret, une façon de mettre à nu, justement (rires), la pudeur féminine qui comme chacun le sait était, en réalité, dans d'autres temps, un élément fort de la séduction. Qu'on ait voulu en faire un symbole de soumission, soit, pourquoi pas. Tout ce qui peut servir à abolir toute forme de soumission, est toujours un sacrifice utile (même si ce sacrifice est parfois en soie-rires-).Bourguiba en cela a fait preuve, comme toujours, d'une grande habilité en communication (…encore elle ?! –rires-), mais au fond, j’en suis plus que convaincue, c'est plus pour des raisons de praticité que la femme tunisienne a abandonné le "safsari".